Ils l’avaient tant aimé : les 100 ans du P.C.I, 2021-1921

Titre original : Lo avevano tanto amato, PCI 100 anni (2021-1921)
Auteurs : Hugues Le Paige, Ludovica Tortora De Falco
Un projet de film sur la participation des Italiens à la vie du parti communiste : la vie quotidienne des sections, dans les quartiers et dans les campagnes.
Un documentaire de matériels d’archives cent ans après la naissance du parti communiste le plus important d’Occident (1921-2021).

Pourquoi et comment raconter les 100 ans qui se sont écoulés depuis la naissance du Parti Communiste Italien (1921-2021) ?

Il est évident que des historiens, des politologues et des journalistes y consacreront des articles, des livres et, pourquoi pas, des films.

Notre objectif n’est donc pas seulement d’ajouter notre pierre à l’édifice, mais plutôt de proposer un point de vue original pour traiter de ce chapitre important de l’histoire italienne et européenne : la place qu’occupait le parti, pour ceux qui y adhéraient, était effectivement tout à fait particulière.

Les personnes
Nous nous proposons de raconter cette particularité du communisme italien – ce « communisme démocratique » comme l’appelait Berlinguer – en nous concentrant sur la participation des militants aux activités du parti, parce que c’était pour eux à la fois une famille ou un lieu sûr, et un lieu de formation non seulement politique mais aussi intellectuelle et personnelle (« notre université », disaient même certains).

Il nous semble opportun de partir du film de Vittorio De Sica, Le voleur de bicyclette : pour tenter de retrouver son outil de travail indispensable qu’on vient de lui dérober, le protagoniste du film s’adresse au commissariat de police où sa demande est balayée d’un simple geste et où on le renvoie chez lui sans espoir de retrouver son vélo. Que fait alors Antonio Ricci, notre prolétaire désespéré ?

Il rejoint la section locale du PCI de la périphérie populaire de Rome où il habite, à Val Melaina, à la recherche d’aide et de réconfort. Le voleur de bicyclette, un film considéré comme l’archétype du néoréalisme italien, date de 1948. Et plus qu’un long discours, cette séquence du film illustre parfaitement la place qu’occupait le PCI dans les années 50 et qui restera encore la sienne pendant de nombreuses années.

Nous chercherons donc à donner un visage et un nom à ceux qui ont construit leur vie quotidienne dans ces sections, et qui y ont pris leur respiration pour insuffler vie à leurs espérances.

Le cadre historique

Le PCI naît en 1921, avec le nom de Parti Communiste d’Italie, à Livourne, et il se dissout officiellement le 3 février 1991 ; une histoire longue et intense, au cours de laquelle il a aussi connu des moments de sérieuses crises internes (comme lors des interventions armées de l’Union Soviétique en Hongrie en 1956 et en Tchécoslovaquie en 1968, et du conflit Chine-URSS en mai 1968). Ces crises sont aussi accompagnées du poids de nombreuses polémiques. De même, le parti a expérimenté des divisions et des séparations. Et comme tous les partis communistes, il a également connu les dérives de la bureaucratie.

Tout cela n’enlève rien au fait que, avec des résultats irréguliers, le PCI reste dominant et dans une position hégémonique au sein de la gauche jusqu’à la moitié des années 70, avec deux succès majeurs, en 1975 aux élections régionales et en 1976 aux élections législatives. Le parti d’Enrico Berlinguer et de l’eurocommuniste faisait rêver la gauche européenne.

En juin 1984, la mort de Berlinguer, frappé par une attaque cardio-vasculaire au cours d’une rencontre pour la campagne aux élections européennes, marque sans aucun doute le début de la fin d’une Histoire. À Rome, les funérailles du dirigeant réunissent deux millions d’Italiens : avec le recul, elles apparaissent comme le chant du cygne du PCI.

La crise des années 80 et le triomphe de l’ultra-libéralisme avaient déjà commencé à laisser des traces, même au sein du PCI. La participation des militants diminue, les dirigeants se confondent avec la société dominante.

Mais même si l’autodissolution du PCI en 1991 a été un traumatisme profond pour ses militants et sympathisants en Italie comme ailleurs, une image forte et sans aucun doute parfois un peu mythifiée de ce que fut le plus grand parti communiste du monde occidental est toujours vive.

Notre film, construit avec le matériel disponible dans les archives italiennes, retrace les différentes étapes de l’histoire du PCI.

Le film raconte le PCI depuis sa création en janvier 1921 à Livourne comme parti minoritaire issu de la scission du Parti Socialiste Italien (PSI), jusqu’à sa dissolution en 1991, en passant par les contributions idéologiques d’Antonio Gramsci encore aujourd’hui objets de discussions et par la construction d’une voie italienne vers le socialisme, dessinée par Palmiro Togliatti puis finalisée par Enrico Berlinguer. Le film aborde aussi l’aspect de l’évolution d’un parti composé de professionnels et de militants dans la période précédant la guerre, à un parti de masse forgé au sein de la résistance antifasciste et qui développe sa force (presque deux millions de membres) après la Libération (25 avril 1945). Une place importante sera aussi consacrée à « l’hégémonie culturelle » du PCI qui, bien que tout à fait réelle, ne réussira jamais à se traduire par une participation au pouvoir central, même si le parti avait le contrôle sur de nombreuses villes et régions. Nous mettrons enfin en relief les tentatives avortées du « compromis historique » (union du PCI et du Parti Chrétien-Démocrate pour renforcer le pouvoir du peuple, projet porté par Enrico Berlinguer et Aldo Moro) et de l’eurocommunisme.

Les grands chapitres de la vie du PCI et les grandes étapes historiques qui leur servent de toile de fond, indispensables à la reconstruction historique, seront racontés synthétiquement, à travers les images classiques des archives de la politique : des discours, des grands événements, le personnel dirigeant, des réunions, etc.

Ce que l’on souhaite avant tout, c’est raconter la participation des militants « de base » à l’activité politique, leur sentiment, leur implication personnelle et quotidienne. C’est leur voix qui sera au centre du film et qui donnera corps à l’identité même du PCI.

Les films documentaires et de fiction qui ont tenté de faire émerger cette réalité à différentes époques spécifiques sont nombreux. Il existe beaucoup de documentation audiovisuelle auprès des fondations et des instituts. C’est là que nous chercherons les scènes de vie quotidienne du parti, les débats, les fêtes et les rencontres, les conflits et les états d’âme de ces militantes et militants, qui seront les « héros » parfois victorieux et souvent vaincus d’une expérience politique sans équivalent.

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